Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
20 avril 2016 3 20 /04 /avril /2016 10:13

Paru dans PasseportSanté.net le 8 avril 2016,

par

Les fausses promesses des faux sucres

Non seulement les édulcorants (faux sucres) n’aident pas la perte de poids, ils pourraient même causer des dommages dont augmenter le risque de diabète et de maladies cardio-vasculaires.

Le discours, encore populaire, que la prise de poids est le résultat de l’écart positif entre le nombre de calories ingérés et le nombre de calories dépensés, contribue énormément à la popularité des édulcorants à zéro calorie ou peu de calories.

Aspartame, sucralose, saccharine, acésulfame-potassium ont envahi nos produits alimentaires depuis les années 70 avec la promesse du « zéro calorie égale perte ou prévention de la prise de poids ». Mais 40 ans plus tard,  les édulcorants  ne semblent pas avoir rendu la marchandise. Voyons-y de plus près.

L’augmentation de la consommation d’édulcorants  entre 1970 et 2000 aux États-Unis a coïncidé avec l’augmentation de la prévalence de l’embonpoint et de l’obésité aux États-Unis. Dans une étude menée auprès de 23 000 Américains, on a constaté que les personnes qui boivent régulièrement des boissons avec édulcorants (sans sucre) ne réduisent pas, au bout du compte, leur apport calorique journalier comme ce qui aurait été supposé1. Plusieurs études ont démontré que remplacer le sucre par des édulcorants ne fait pas perdre de poids. Comment cela s’explique-t-il? Trois hypothèses circulent actuellement pour expliquer l’échec des succédanés à prévenir le surpoids ou à le diminuer.

1- Distorsion cognitive

La consommation de produits avec édulcorants peut créer une distorsion cognitive. En effet, la consommation d’aliments avec édulcorant étant perçu comme « faible en calorie et santé » peut nous donner bonne conscience et nous inciter  à consommer plus de d’autres aliments au cours de la journée. On peut se dire par exemple : « puisque j’ai pris une boisson gazeuse diète avec ma pizza, je peux me permettre une pointe de pizza de plus! ». Ce phénomène expliquerait en partie pourquoi les gens qui consomment des édulcorants ont au final un apport calorique équivalant à ceux qui n’en prennent pas.

2- Altération du métabolisme des vrais sucres

Les édulcorants déjouent les papilles gustatives. En prenant quelque chose qui goûte sucré, le cerveau s’attend à ce que ça procure des calories.  Dans une étude chez le rat réalisée dans les laboratoires du Dr. Swithers, une chercheure qui s’oppose aux édulcorants, les animaux soumis à une diète riche en édulcorants ne produisaient plus les mêmes réactions métaboliques lorsqu’ils étaient exposés à du vrai sucre2. En effet, ils ne produisaient plus les hormones pour éliminer le vrai sucre du sang et on observait une diminution des hormones de la satiété. La conséquence était notamment une élévation du taux de sucre sanguin. Cet affaiblissement des réactions physiologiques et métaboliques en présence de vrai sucre causé par les édulcorants chez les rats pourrait avoir de graves conséquences comme augmenter les risques de diabète et de maladies cardio-vasculaires3.  Avant de conclure a un tel effet, ces études devront être conduites chez l’humain. C’est à suivre.

3- Induction de l’intolérance au glucose par altération de la flore intestinale

En 2014, une étude publiée par la revue Nature4 a sonné l’alarme concernant l’impact des édulcorants sur l’intolérance au glucose. L’intolérance au glucose, précède souvent le diabète, c’est une difficulté du corps à gérer le glucose de façon adéquate. Elle se caractérise par un taux de glucose sanguin plus élevée que la normale mais pas suffisamment pour établir le diagnostic du diabète.

Cette étude donnait les résultats de plusieurs expérimentations sur le même sujet. En résumé, les souris qui avaient consommé des solutions d’édulcorants ont développé une intolérance au glucose. Pour évaluer l’impact des succédanés sur la flore intestinale, les chercheurs ont donné des antibiotiques aux souris dans le but d’éliminer leur flore intestinale. Aucune des souris « sans flore » n’est devenue intolérante au glucose après avoir pris la solution d’édulcorant. Une petite étude chez l’humain  (7 sujets) a démontré qu’en 6 jours d’une diète élevée en édulcorant (saccharin), 4 des 7 participants ont développé une intolérance au glucose. Les sujets n’ayant pas développé d’intolérance avaient une flore différente de ceux l’ayant développé. Il semble donc que la flore intestinale joue un rôle dans le métabolisme du glucose et que les édulcorants altèrent la flore intestinale. Évidemment, cette étude devra être reproduite à plus grande échelle afin de confirmer l’impact des édulcorants sur le risque de diabète.

Conclusion

Les preuves s’accumulent à l’effet que les édulcorants n’offrent pas d’avantage santé et pourraient même causer des problèmes. On le constate, quand il est question de poids et de santé, le simple calcul des calories ne suffit pas. Plutôt que d’utiliser les édulcorants pour remplacer le sucre tout en continuant à manger aussi sucré, il vaut mieux essayer de réduire sa consommation de sucres totales et d’améliorer la qualité globale de son alimentation pour réduire notre dépendance au goût sucré et mieux gérer son poids.

 

 

Références : 

1.Bleich SNWolfson JAVine SWang YC. Diet-beverage consumption and caloric intake among US adults, overall and by body weight.Am J Public Health. 2014 Mar;104(3):e72-8.

2.Davidson TL, et al. Intake of high-intensity sweeteners alters the ability of sweet taste to signal caloric consequences: implications for the learned control of energy and body weight regulation. Q J Exp Psychol (Hove) 2011;64:1430–1441. 

3.Swithers SE. Artificial sweeteners produce the counterintuitive effect of inducing metabolic derangements. Trends Endocrinol Metab. 2013 Sep;24(9):431-41.

4.Suez JKorem TZeevi DZilberman-Schapira GThaiss CAMaza OIsraeli DZmora NGilad SWeinberger AKuperman YHarmelin A,Kolodkin-Gal IShapiro HHalpern ZSegal EElinav E. Artificial sweeteners induce glucose intolerance by altering the gut microbiota. Nature. 2014 Oct 9;514(7521):181-6.

Partager cet article
Repost0